L’ECART NAIT DE VOYAGES
Il nous fallait un quartier général pour discuter et nous plonger un peu dans la vie mondaine de Sainte-Anne. Ici ce n’est pas souliers vernis ni robes longues mais tongs et shorts. C’est à Paille Coco que nous avons trouvé ce que nous cherchions:
Il n’y paraît pas mais ce bar restaurant, les pieds dans l’eau, est très fréquenté par des plaisanciers de passage et qui veulent simplement, comme nous, se changer les idées. Beaucoup vivent sur leur catamaran ou monocoque et s’en reviennent du Venezuela. A table, on discute, on échange, on surf sur Internet, on boit, on mange, on rit, on commente la météo, on cogite, on raconte ses exploits… Nous avons même rencontré un breton qui vient juste d’achever un convoyage d’un catamaran de luxe depuis la métropole. Il a essuyé une tempête et avec ses coéquipiers a failli abandonner le navire au large des Açores tellement la mer était démontée. Pour les connaisseurs, ils ont filé à lus de 20 nœuds avec le bateau de plus de trente tonnes.
Le troquet n’a pas l’air mais il est vaste à l’intérieur et les propriétaires ont même une boulangerie sur le devant. C’est pas Poilâne mais qui s’en soucie? Le pain est bon mais les gâteaux pas terribles comme tous ceux déjà goûtés dans l’île. Les pâtissiers doués préfèrent faire fortune à Paris ou New-York.
A la vitesse où se meuvent les gens d’ici, j’imagine qu’il n’y a pas de service de cardiologie à l’hôpital de Fort de France. Le soleil est brûlant entre 11 et 15h et ralentit fortement toute envie de courir, de s’énerver ou de marcher plus vite que son voisin. Seule une noix de coco qui vous tombe sur la tête peut, peut-être, réveiller la bête qui est en vous. Qui sait? En tous cas, j’ai jamais vu un créole courir même si le bateau est au bout du quai et finit par s’en aller en laissant la personne nonchalante exaspérée attendre le prochain départ dans une heure.
Ce qui fait jaser ici, c’est la journée la plus froide qui fut il y a une année ou deux à 19°C. Les autochtones s’en souviennent parce qu’il fallut acheter des pulls, introuvables sur l’île.
La photo ci-après vous montre notre amie qui barbecute pour notre confort soit du poulet coco, soit du travers de porc et Julie espère un jour un gigot. Un amour de martiniquaise que j’aurais bien voulu avoir comme nounou, comme gouvernante ou comme épaule les jours où l’on a envie de pleurer:
Elle est costaude, ne se laisse pas pousser de champignons dans la cervelle et son accent langoureux invite à la biguine. L’ambiance sous les tropiques à ses couleurs et ses avantages! Ainsi, nous nous laissons aller au gré des rencontres sachant, qu’au final, c’est la France qui aura le sourire de la Hongrie pour un jus tiré d’une noix de coco.
Le 24 décembre sur la place du village il est une tradition de monter une crèche vivante. Si trouver un bébé est assez simple, dénicher un âne dans l’île est une autre paire de palmes! Pourquoi JC n’est pas venu au monde entre deux dorades royales et deux mérous? Tout aurait été tellement plus simple ici ? Coluche disait qu’heureusement que le Christ ne s’est pas noyé car alors chacun aurait un aquarium au mur, au dessus de son lit ou de sa porte.
Et puis Joseph et sa femme ont reçu la visite de rois Mages… Sarko n’a rien inventé! Pourquoi JC n’a pas été visité dans sa crèche par des clochards? N’est pas l’Abbé Pierre qui veut! Se commettre avec des va-nu-pieds est un style, tout comme celui de voyager avec Bolloré ou trinquer avec Johnny. Les hommes sont libres… mais pas égaux en droit, en cour et encore moins à la banque.
La crèche vivante a été montée au centre du village et 20 acteurs amateurs nous refont les scènes de la naissance de JC:
C’est pas du Dullin mais plutôt du De Funes qu’aurait bien pris le soleil a en avoir attrapé un accent sur la langue. On a envie d’y croire à cette naissance. Cette crèche en chocolat est à croquer.
Il fait tiède, la nuit est tombée à 18h. Il est 19h et dans une heure commencera la messe de minuit. Elle se déroulera à l’église du bourg dont le plafond tout en bois ressemble à une coque de bateau retournée
Quand les charpentiers n’ont pas d’idées ils font des coques retournées. Après tout, d’autres font bien des manteaux en chameau retourné. Cela n’a rien à voir, c’est juste pour m’amuser.
L’église est pleine à craquer.
Chacun est sur son 31 et habillé avec goût. Mon voisin de devant à des bouts de lunettes ciselées en argent et sa voisine des boucles en chapeau chinois qui sont peut-être en or. Visez plutôt :
Si j’avais su j’aurais mis mes bagues, un nœud papillon et un costume en alpaga. Julie a été placée sur un des bancs du fond et moi plus sur le devant entre une religieuse et une jeune femme. Je n’ai pas eu le choix, bien coincé entre ces deux femmes. Pour ne pas paraître rustre et touriste idiot, j’ai chanté tous les cantiques. Heureusement, ce n’est pas du Bartok.
A noter que le prêtre est polonais avec un accent très prononcé mais si reconnaissable et si particulier. Du coup, j’ai pensé à notre mère qui nous emmenait à la messe de minuit à l’église polonaise de Paris. Clin d’œil au passé bien intéressant.
Parlons bouffe, il y a longtemps, non? La tradition martiniquaise est de manger pour le réveillon du cochon. Il est ici noir et tourne à la broche tout l’après-midi (Concurrence pour mon ami Coco et le méchoui de nos 30 ans de mariage):
Nous avons préféré une langouste dans un minuscule resto sur le port.
Les tenanciers sont rigolards et le menu est composé de jambon et pâté de Noël, boudin créole, un genre de carottes râpées avec salade. Les desserts furent un « blanc mangé » et un gâteau au coco. Marrants mais pas excellent.
Voilà, amis de nos fêtes! A la Martinique tout est spécial. On peut aussi sourire aux vents et même photographier son propre bonheur en pleine tranquillité:
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